La vie profonde et tout intérieure d'un saint
« Qu'est-ce qu'il a fait votre saint ? », demandent parfois les visiteurs. On est embarrassé pour répondre. Il n'a rien fait d'éclatant, du moins de ces actions d'éclat, qui frisent le scandale et intéressent le journaliste d'aujourd'hui. Il en a trop fait, pour qu'on puisse en quelques mots répondre à l'interlocuteur.
Les grandes lignes de la spiritualité de saint Michel peuvent se définir en quelques mots. Sa vie s'est déroulée entre deux pôles : l'Incarnation du Verbe, fondement de sa doctrine, et le service de Dieu, base de son action.Deux images ont habité en permanence son âme : le manifeste du Christ venant en ce monde : « Ecce Venio : Me voici, Père », et, à la suite de cette démarche, une deuxième image sous la forme de trois lettres : FVD, qui fut la devise de notre saint : « Fiat Voluntas Dei : que la volonté de Dieu soit faite ! »
D'un pôle à l'autre un seul chemin, l'amour de Dieu. Pour le fondateur, la qualité de l'amour est le seul principe d'appréciation : « L'amour, voilà ce qui mène l'homme ; voilà le secret ressort qu'il faut découvrir chez les postulants et les novices... »
Fils de ces paysans habitués à fouiller profondément le sol où doivent se développer les racines, il avait élaboré une doctrine pratique, à la forte architecture, qui mène d'un seul élan vers le sommet de la sainteté.
Un monument conçu à l'image de la vie du saint
« Ce splendide poème de pierre, de marbre et de fer, composé en l'honneur du Bienheureux, est en harmonie profonde avec sa vie. » La nouvelle chapelle fut insérée par l'architecte B.-G. Andral, ancien élève de l'École du Louvre, dans les vieux bâtiments, entre l'ancien sanctuaire et la Maison-Mère de la Congrégation. Sans façade sur la rue, confondue dans la ligne des vieux bâtiments, sans tours, ni coupoles, ni clochers extérieurs, rien n'exprime mieux que cette chapelle la vie toute intérieure du Père Garicoïts. Ce monument s'harmonise encore avec les lignes maîtresses de sa doctrine.
Elle en a la solidité du fondement. Bâtie, à la lettre, sur le roc (teschénite), 4 gigantesques piliers de cette roche bloquée, et des murs de château-fort, supportent colonnade et dôme. Elle en a le dessin rectiligne : elle s'élève d'un seul élan jusqu'au sommet de la coupole sans que rien n'arrête, ni dévie, le coup d’œil.
Elle présente aussi un caractère de beauté attirante et reposante. Pas de fioritures, ni d'ornements superflus ; mais les matériaux eux mêmes sont pliés pour ne former qu'un dessin ; surfaces planes ou cintrées, marbres rouges et verts ; fers forgés, jouent une merveilleuse symphonie de lignes et de couleurs.
Elle en a le mouvement. Fondé sur l'humilité « Dieu tout, moi rien », cheminant au gré de la volonté de Dieu, saint Michel s'est élevé tout droit jusqu'à la sainteté. Cette élévation progressive de l'âme est parfaitement exprimée par les dix colonnes monolithes, en marbre d'Estours (Ariège). Leurs bases sont reliées par des balcons en fer forgé, dont les figures symboliques représentent les vertus du saint.
Au-dessus des colonnes est suspendue une coupole. Le beau vitrail qui en ferme la voûte, œuvre des Frères Maumejean, montre saint Michel accueilli par Notre-Dame de Bétharram et présenté à son Fils : l'apothéose de Michel Garicoïts. L'ensemble de l'édifice laisse l'impression de solidité, d'élan, d'ordre et de lumière. Plus qu'un mémorial, cette chapelle garde une présence, elle a une âme. L'anneau des colonnes et des balcons s'interrompt pour enserrer comme un joyau les Reliques du saint. Une châsse en bronze ciselé et doré, dans le goût du XVIIe siècle, contient un gisant aux yeux ouverts : le père Garicoïts, en habits sacerdotaux, les mains ouvertes pour dire encore : « Ecce venio, Me voici. »
De la pauvre maison natale à ce palais de marbre, le pâtre d'Ibarre a fait du chemin ! Un touriste peut s'étonner des richesses dont on entoure les Restes d'un serviteur de Dieu. L'homme de Foi sait que Dieu produit dans l'âme de ceux qui ont voué leur vie à son amour des choses plus merveilleuses encore. |